Loi "Avenir Montagne"
Le récent rapport de la cour des comptes sur les stations de montagne face au changement climatique retrace les grand choix politiques qui ont conduit la France dans les années 1960-1970 à se placer parmi les destinations privilégiées du tourisme hivernal. Les « plans neige » initiés par l’Etat ont ainsi conduit à la création de stations de montagne de toute pièces : 150 000 lits d’hébergement touristique ont été créés en quelques années et ont permis de développer massivement un tourisme hivernal en montagne.
L’enquête réalisée par les juridictions financières pour la Cour des Comptes a pour objet de préciser les conséquences du changement climatique sur le tourisme hivernal en montagne et d’examiner comment les stations s’y sont adaptées.
Le rapport met en lumière un modèle économique qui s’essouffle et pointe les politiques d’adaptation mis en œuvre notamment par la Loi Montagne, qui restent bien en deçà des enjeux environnementaux mais aussi sociaux. Il montre enfin qu’à défaut de repenser fondamentalement le modèle économique, le niveau de subventionnement public -qui peut atteindre quelquefois 25% du poids dans le chiffre d’affaires des stations- ne pourra que s’alourdir compte tenu des projections climatiques, en enfermant les collectivités dans un sentier de dépendance au ski, les privant de marge de manœuvre pour développer un tourisme « quatre saisons » ainsi que des projets à destination des habitants du territoire. Il pointe également une nécessaire réorientation de la dépense publique afin de répondre à une « pleine et entière transition du modèle économique des stations vers l’adaptation au changement climatique » ainsi que la nécessité d’une gouvernance élargie pour une meilleure préservation des ressources naturelles.
Les six recommandations de la cour des comptes :
- Mettre en place un observatoire national regroupant toutes les données de vulnérabilité́ en montagne accessibles à tous les acteurs locaux (ministère de la transition écologique et de la cohésion des territoires).
- Faire évoluer le cadre normatif afin que les autorisations de prélèvements d’eau destinés à la production de neige tiennent compte des prospectives climatiques (ministère de la transition écologique et de la cohésion des territoires).
- Formaliser des plans d’adaptation au changement climatique, déclinant les plans de massifs prévus par la loi Climat et résilience (autorités organisatrices, ministère de la transition écologique et de la cohésion des territoires).
- Conditionner tout soutien public à l’investissement dans les stations au contenu des plans d’adaptation au changement climatique (ministère de la transition écologique et de la cohésion des territoires, régions, départements).
- Mettre en place une gouvernance des stations de montagne ne relevant plus du seul échelon communal (ministère de l’intérieur et des outre- mer, collectivités territoriales).
- Mettre en place un fonds d’adaptation au changement climatique destiné à financer les actions de diversification et de déconstruction des installations obsolètes, alimenté par le produit de la taxe sur les remontées mécaniques (ministère de la transition écologique et de la cohésion des territoires, ministère de l’économie et des finances et de la souveraineté́ industrielle et numérique).
La position du député :
Bien que les infrastructures à destination des touristes bénéficient aussi aux habitants du territoire (piscine ; complexe sportif etc.), il semble nécessaire de s’interroger sur la pertinence de ces financements qui peuvent parfois endetter les communes et communautés de communes sur des dizaines d’années. Ainsi, la résilience des stations est davantage envisagée par l’addition de nouvelles activités touristiques qui ne dépendent pas de la neige que comme une reconversion planifiée des activités neige vers le « quatre saisons ». Il semble donc en effet que les différents plans Montagne envisagent davantage une croissance globale du chiffre d’affaires des stations plutôt que le financement de projets dans une démarche de transition et d’attractivité du territoire.
Ce manque d’attractivité est d’autant plus visible au regard de la disparition inquiétante des services publics dans certaines zone de montagne (fermeture de classes ; diminution de l’offre de santé ; disparition des guichets de La Poste ; fermeture de lignes ferroviaires…) mais aussi des difficultés d’accès au logement pour les habitants, notamment avec la pression immobilière des locations saisonnières.
Les vallées des Alpes du Sud ne pourraient-elles pas servir de lieu d’expérimentation à un vrai développement durable avec une planification écologique ? Il pourrait être envisagé de :
– faciliter l’accès au foncier pour les habitants en régulant en zone de montagne les locations saisonnières
– d’introduire dans la loi des critères facilitant le maintien des écoles en zone montagne et rurales afin qu’elles ne soient pas menacées chaque année par la carte scolaire et les fermetures de classes. L’école est souvent le dernier service public maintenu dans les communes et est un facteur de vitalité et d’attractivité.
– d’entamer une réelle réflexion sur l’ambition scolaire des familles et des élèves (tout particulièrement les filles) ainsi qu’une politique volontariste pour permettre l’égalité d’accès à l’enseignement supérieur.
– de participer à plus grande ampleur au financement des associations et dynamiques existantes, notamment culturelles pour faire vivre le territoire
– de sortir de la logique des appels d’offre, qui met en concurrence les projets et implique nécessairement des positionnement politiques, parfois au détriment de la population.